Le Bruit de voisinage dans la copropriété.

 

Etude et analyse de la réglementation.

 

 

 

Classification des bruits.

 

Les bruits peuvent être classés en deux sources principales :

-          les bruits liés à la réalisation de travaux,

-          Les bruits dont l’origine provient des activités de vie quotidienne et de loisirs.

 

Les bruits liés aux travaux.

 

Ces bruits font l’objet principalement des articles 40 et 41 du règlement de copropriété. Les dispositions qui y sont inscrites font loi pour tous les copropriétaires et peuvent être opposées aux tiers (entreprises, artisans…).

 

Nul ne peut y déroger de son propre chef. Seuls sont compétents pour ouvrir à une autorisation spéciale, ponctuelle et personnelle pour travaux dépassant les limites de temps fixées :

-          l’Assemblée Générale de copropriété par vote,

-          le Tribunal d’Instance de Brest par décision judiciaire,

 

Il est à préciser que les agents des forces de Police n'ont absolument aucune compétence pour proposer ou autoriser dérogation dans ce domaine. Il ne peuvent agir en matière de bruits qu'au niveau pénal. Ils doivent de plus à cet effet disposer des habilitations nécessaires précisées par la loi 78-788 du 22 juillet 1978 portant sur la police judiciaire (code de procédure pénale article 15), et intervenir dans le cadre restreint et précis des dispositions du Code de procédure pénale (articles 14 et 17) afin de procéder à la recherche et à la constatation des infractions.

 

Les bruits liés à la vie quotidienne et aux loisirs.

 

Ces bruits font l’objet de plusieurs articles du règlement de copropriété et notamment des articles 18, 31, 32 et 38. Tous ces articles ne font que reprendre  de façon succincte et abrégée les termes de la réglementation générale en vigueur à laquelle il sera toujours bon de se référer et qui s’applique pleinement et dans son entier à la copropriété :

-          Code de la Santé Publique (articles R-48.3 et R48.4    article R-36.9 de la nouvelle partie réglementaire),

-          Décret 95-408 du 18 Avril 1995 (J.O. du 19 Avril 1995),

-          Circulaire Ministérielle du 27 Février 1996 (J.O.  n° 84 du 7 Avril 1996 page 5474)…

 

Les bruits de voisinage sont donnés dans les textes suivant une typologie bien précise qui permet de cerner ceux qui peuvent être à l’origine de troubles répréhensibles. Sont exclus volontairement de cette liste les bruits liés notamment aux jeunes enfants (cris et pleurs de nouveau-nés), et de ceux nécessaires à une vie quotidienne normale (préparation de repas, hygiène générale…) Il est à préciser qu’en France, une disposition telle que l’interdiction de présence de familles avec jeunes enfants dans une résidence est absolument illégale et considérée comme non écrite, contrairement à ce qui peut se voir dans certains états des Etats-Unis.

Pour information, la liste est la suivante :

les bruits inutiles, désinvoltes ou agressifs pouvant provenir :

-          des cris d'animaux et principalement les aboiements des chiens ;

-          des appareils de diffusion du son et de la musique ;

-          des outils de bricolage, de jardinage ;

-          des appareils électroménagers ;

-          des jeux bruyants pratiqués dans des lieux inadaptés ;

-          de l'utilisation de locaux ayant subi des aménagements dégradant l'isolement acoustique ;

-          des pétards et pièces d'artifice ;

-          des activités occasionnelles, fêtes familiales, travaux de réparation ;

-          de certains équipements fixes : ventilateurs, climatiseurs, pompes à chaleur, non liés à une activité fixée à l'article R. 48-3 du code de la santé publique.

 

Une dérive déjà connue était effectivement d’inclure en interdiction dans un règlement de copropriété, certaines activités de la vie quotidienne non incluses dans la liste limitative ci-dessus énoncée. Cette dérive, observée dans certains anciens règlements, concernait souvent une limitation dans les horaires, voire une interdiction, au niveau des possibilités d’hygiène générale (lavage corporel, douche, …). Afin de mettre un terme à ces abus contraires à l’hygiène, à la santé et à la libre vie intime, la loi SRU 2000-1208 du 13 décembre 2000, par ajout d’un article 49 à la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, a imposé une nouvelle obligation légale : la mise en conformité de tous les règlements de copropriété afin de tenir compte des obligations légales et réglementaires en vigueur, et ce avant décembre 2005. Tout article portant interdiction ou limitation sur des domaines relatifs à la vie privée et intime ne pourra être dès lors que considéré comme non-écrit. Seul reste une préconisation d’ordre général et de bon sens, telle que rapportée strictement et en conformité avec la réglementation par l’article 31 du règlement de copropriété.

 

 

Notions générales et physiologiques sur les bruits.

 

            Le bruit constitue l’un des points principaux de source de tensions et de discorde dans une copropriété. Il est principalement sensible sur les périodes de repos nocturne et de fin de semaine. En effet, la perception d’un bruit est facteur principalement du bruit ambiant qui forme effet de masque. On ne pourra percevoir de manière globale, que les bruits dépassant, émergeant, du bruit de fond d’en moyenne au moins un dixième de décibel. Un bruit donné dans un appartement situé sur une rue passante paraîtra parfaitement inaudible alors qu’il sera clairement entendu dans le calme d’une nuit. L’effet de masque par ailleurs est négligeable tant que le niveau de masque est faible, il croit beaucoup plus vite que le bruit ambiant masquant, et il est maximal pour les fréquences proches du son masquant.

 

Plus est, un même bruit bien que perçu physiologiquement, peut être séparé, même inconsciemment, du bruit ambiant et passer dans un espace dit de « présence » ou, au contraire ignoré ; on en fait abstraction. Mais il est à savoir qu’une personne sensibilisée à un bruit donné peut faire une fixation  (on pourra parler d’une cristallisation si elle devient pathologique) sur ce bruit même s’il est minime. Un bruit important ne la fera absolument pas réagir, il sera occulté, alors que le petit bruit particulier qui serait ignoré par toute autre personne provoquera une réaction brutale et immédiate. Ce phénomène est tout à fait utile et normal dans des cas bien connus. Il en est ainsi couramment de l’hyper sensibilité auditive d’une mère, même assoupie, au bruit léger de la respiration de son nouveau-né. Mais il peut souvent, en dehors de tels cas précis, dériver vers des phénomènes obsessionnels trop souvent illustrés par certains conflits de voisinage. Le Code de la Santé Publique en a bien pris conscience en  écartant de toute mesure répressive les situations ou le bruit particulier reproché inclus dans le bruit ambiant se trouve être à une valeur de 30 dB.A ou inférieure. Cette valeur de 30 dB.A correspond également au niveau haut de la disparition de l’effet de masque en niveaux faibles.

 

Rappelons par ailleurs que la mesure d’un bruit n’est en aucun cas faite sur une échelle arithmétique. Elle se fait généralement en décibels (dont il existe plusieurs courbes pondérées dont la courbe A) et cette mesure se fait sur une échelle logarithmique. Deux appareils produisant chacun 50 déciBels ne feront pas mis en fonction ensemble 100 décibels, bien loin de là. En déciBels, l’écart de sensation « S2 / S1 » sera donné par la formule « 10.log10 (P2 / P1) », P1 et P2 étant les puissances respectives des bruits initiaux et finaux. Un rapport P2 / P1 de 2 donnera un écart de 3 dB ou encore 0,69 Neper. De même, il est à comparer un véhicule ou un cyclomoteur dont le bruit peut atteindre sans difficulté 80 dB et plus  à un mètre, et celui d’un réacteur qui ne dépasse "guère" les 120 décibels au décollage … Pour ceux qui sont intéressés par l’approche mathématique du problème, rappelons que la sensation de perception de variation d’un bruit répond à l’équation, dite d’accoutumance, qui est de la forme :

 

Le niveau de « silence » apparent lié au bruit de fond à obtenir dans différents locaux doit répondre à certaines exigences données par le tableau ci-après :

 

Lieu

Niveau sonore en décibels (dB)

Moyen

Maximal

Studios d’enregistrement radio

de 15 à 20

de 20 à 25

Salles de concert, théâtres, studio d’enregistrement télévision

de 20 à 25

de 25 à 30

Chambres à coucher, hôpitaux

de 25 à 30

de 30 à 35

Appartements, hôtels, salles de conférence

de 30 à 35

de 35 à 40

Bureaux

de 35 à 40

de 40 à 45

 

Rappelons aussi que le silence complet et absolu n’existe pas même en plein désert saharien…

 

 

Limites et mesure des bruits.

 

         Maxima des bruits admissibles.

 

Les limites de bruits à ne pas dépasser ne sont pas à considérer de manière absolue, mais en fonction du niveau de bruit ambiant. Seule sera prise en compte la différence mesurée en décibels entre ce bruit ambiant et le niveau du bruit particulier incriminé. Toutes les mesures seront prises en valeurs de décibels pondérés suivant la courbe A (dB.A).

 

Ces dispositions sont précisées dans l’article R-48.4 du Code de la Santé Publique dont l’extrait suit :

L'émergence est définie par la différence entre le niveau de bruit ambiant, comportant le bruit particulier en cause, et celui du bruit résiduel constitué par l'ensemble des bruits habituels, extérieurs et intérieurs, dans un lieu donné, correspondant à l'occupation normale des locaux et au fonctionnement normal des équipements.

Les valeurs admises de l'émergence sont calculées à partir des valeurs de 5 décibels A (dB.A) en période diurne (de 7 heures à 22 heures) et de 3 dB.A en période nocturne (de 22 heures à 7 heures), valeurs auxquelles s'ajoute un terme correctif, fonction de la durée cumulée d'apparition du bruit particulier, selon le tableau ci-après :

Durée cumulée d’apparition du bruit particulier

Terme correctif en décibels A

30 secondes < T < ou = 1 minute

9

1 minute < T < ou = 2 minutes

8

2 minutes < T < ou = 5 minutes

7

5 minutes < T < ou = 10 minutes

6

10 minutes < T < ou = 20 minutes

5

20 minutes < T < ou = 45 minutes

4

45 minutes < T < ou = 2 heures

3

2 heures < T < ou = 4 heures

2

4 heures < T < ou = 8 heures

1

T >  8 heures

0

 

L’infraction n'est pas constituée lorsque le niveau de bruit ambiant mesuré, comportant le bruit particulier, est inférieur à 30 dB.A.

 

Ainsi, un bruit particulier mesuré à 40 dB.A et d’une durée de 3 minutes effectué de jour, alors que le bruit ambiant est de 30 dB.A, ne pourras être considéré comme limite ou hors tolérances. En effet, l’émergence est de 10 dB.A (40 dB.A - 30 dB.A) par rapport au bruit ambiant, et la valeur admise de 12 dB.A (5 dB.A + correctif de 7 dB.A).

 

         Mesure du bruit et constitution d’infraction.

 

Le matériel utilisé pour le contrôle doit être un sonomètre intégrateur de classe 2 au moins (norme NF EN 60-804).

 

Les mesures sont effectuées selon la norme NF S 31-010 (édition novembre 1987) relative à la caractérisation et au mesurage des bruits de l'environnement. La mesure doit s'effectuer à l'intérieur quand la source est intérieure au bâtiment dans lequel se trouve le plaignant et à l'extérieur lorsque la source est extérieure (voir détail dans la norme NF S 31-010). Il est important de veiller à ce qu'elle s'effectue dans les conditions normales d'utilisation des sources mises en cause. Dans une pièce, le sonomètre devra être tenu éloigné de toute paroi (cloisons, sol ou plafond), et à une hauteur normalisée du sol suivant dispositions données par la norme.

 

Il est à noter que les bruits excessifs et ne pouvant prêter à contestation, car largement au-dessus des limites admises (caractérisées par la durée, la répétition ou l’intensité) et réalisés sciemment, pourront être constitutifs d’une infraction, même sans que des mesures sono-métriques soient réalisées (cf. Circulaire Ministérielle du 27 Février 1996). Cependant, tout autre bruit devra faire l’objet d’une mesure effectuée suivant les normes par des agents habilités et spécifiquement formés suivant dispositions précisées au paragraphe 1.2 et en annexe technique de la circulaire ministérielle ci-dessus mentionnée, sous peine de nullité de la procédure.

 

Pour ne pas se placer, même étant de bonne foi, dans une situation embarrassante par plaintes infondées sur un bruit de trop faible intensité pour être constitutif d’infraction, il peut être judicieux de faire contrôler soit même au préalable les niveaux sonores des bruits particuliers perçus comme gênants par du personnel d’une société habilitée. Un abus de plaintes insuffisamment fondées en la matière, peut toujours être considéré comme, d’une part une forme de harcèlement envers le voisinage, et d’autre part un abus d’appel à procédures.

 

Notons cependant, que dans certains cas particuliers et spécifiques, il peut être demandé à bénéficier de mesures plus rigoureuses avec abaissement des limites légales ci-dessus mentionnées (bruit ambiant et bruits particuliers limités par exemple à un plafond inférieur à 20 dB.A au lieu de 30 dB.A). Il appartiendra alors aux Tribunaux Civils d’en apprécier l’utilité et le bien fondé.

 

 

 

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