Le Conseil national de la consommation se penche sur la sécurité des installations électriques intérieures

(CCRF Actualités n° 182 - janvier 2005)

 

Un groupe de travail du Conseil national de la consommation (CNC) s'est mis en place en novembre 2004 pour examiner la question de la sécurité des installations électriques intérieures des particuliers. Ce groupe, qui s'est déjà réuni quatre fois, devait rendre un rapport d'étape qui servira de socle à l'établissement de propositions.

Les interrogations récentes sur la sécurité électrique

Nombre d'installations ne sont pas adaptées aux équipements actuels

Au cours des dernières décennies, les activités consommatrices d'énergie au domicile des ménages se sont fortement diversifiées. Les foyers se sont équipés de nombreux appareils ménagers (lave-linge, lave-vaisselle, réfrigérateur, four à micro-onde, etc.), de confort (sèche-cheveux, fer à friser, lampes halogènes…) et de loisirs (télévision, magnétoscope, lecteurs DVD, micro-ordinateurs et leurs périphériques...). Or cette multiplicité n'est pas toujours compatible avec un fonctionnement sûr des installations existantes. Beaucoup de consommateurs ne le savent pas.

Nombre d'entre eux ignorent également que les installations électriques sont soumises à une usure progressive. Or la "fée Électricité" n'est pas aussi magique que son invisibilité pourrait le faire croire : en l'absence d'entretien et de modernisation, les installations électriques peuvent être considérées comme vétustes au bout de trente ans. En outre, les aménagements qu'apportent les consommateurs eux-mêmes à leurs installations peuvent être une source de danger.

Les inquiétudes des associations de consommateurs

La mise en place, dans le cadre du CNC, d'un groupe de travail sur ce sujet de la sécurité électrique répond à une forte demande des associations de consommateurs qui ont fait connaître leurs préoccupations, notamment par voie de presse. De son côté, la Commission de sécurité des consommateurs, dans un avis du 3 décembre 2003, s'est inquiétée de l'insuffisance des dispositifs de diagnostic, de contrôle et de sensibilisation des consommateurs.

Par ailleurs, sur un plan beaucoup plus général, le Premier ministre et le ministre de la consommation ont annoncé, le 24 juin dernier, un plan de relance de la lutte contre les accidents de la vie courante, en fixant des objectifs chiffrés de réduction du nombre de morts et de blessés.

Dans ce contexte, le groupe de travail du CNC pourra utilement formuler des recommandations sur le sujet particulier de la sécurité des installations électriques intérieures.

Le constat du groupe de travail

Le groupe, dès ses premières réunions, a constaté que la sécurité des installations électriques domestiques préoccupe depuis longtemps pouvoirs publics, professionnels et associations de consommateurs.

Une situation préoccupante dans l'habitat ancien

Si l'habitat récent ne pose pas de problème particulier, le décret du 14 décembre 1972 imposant un contrôle obligatoire préalablement à la mise sous tension de l'installation, il n'en est pas de même de certains logements anciens qui font apparaître un risque pour leurs occupants.

Selon l'étude menée en 1998 par l'Observatoire national de la sécurité électrique (ONSE), parmi les 16 millions de logements de plus de 30 ans, 46 %, soit plus de 7,3 millions, ne répondaient plus aux règles de sécurité. Il faudrait ajouter à ce nombre, chaque année, 300 000 logements supplémentaires.

Parmi ces 7,3 millions de logements, 2,3 millions étaient équipés d'installations électriques particulièrement dangereuses : contacts électriques directs, mises à la terre inadaptées, risques multiples…

Ces chiffres sont à rapprocher de ceux qu'avançait la Commission de sécurité des consommateurs dès 1987 : 40% des installations électriques étaient alors jugées "non conformes aux règles de sécurité et souvent dangereuses pour les personnes et les biens".

L'expérimentation menée par PROMOTELEC et CONSUEL en 2002 pour tester la démarche "confiance-sécurité" dans 4 départements métropolitains, les constats des pompiers lors des interventions sur incendies dans les logements confirment la dangerosité de certaines installations, trop anciennes ou réalisées sans respect des règles du métier.

Une centaine de morts par an

Dans une étude de 1997, réalisée par le Cabinet ALC agissant pour le compte d'EDF, le chiffre de 90 décès annuels à la suite d'accidents électriques domestiques était avancé.

Une autre enquête de 1994 portait quant à elle sur 67 décès par électrocution en milieu domestique en 1993. Mais il ne s'agissait là que des chiffres relevés dans le seul cadre des services d'urgence.

Si les effets tragiques des incendies sont bien connus, beaucoup de Français ignorent la multiplicité des atteintes à la santé humaine que peuvent provoquer les électrocutions.

Ainsi, les brûlures d'origine électrique peuvent défigurer. Les décès par arrêt cardiaque peuvent intervenir 12 à 24 heures après l'accident. Les complications pulmonaires peuvent apparaître le lendemain de l'électrocution. Celle-ci peut provoquer des paralysies transitoires, des troubles de la mémoire et des atteintes psychologiques.

Le Centre national de prévention et de protection (CNPP), organisme lié aux compagnies d'assurance, note l'absence d'outil statistique pour évaluer les causes des incendies, mais estime qu'environ 25 à 30% de ceux-ci (soit 80 000 sur 250 000 chaque année) pourraient être d'origine électrique, évaluation partagée par les Pompiers de Paris. Il en résulterait 2 000 victimes et au moins 100 décès par an.

Ces accidents domestiques ont comme premières victimes les enfants (40%) de 0 à 9 ans.

Cela démontre la nécessité de renforcer la prévention de tels accidents.

L'objectif : des recommandations concrètes pour réduire les risques

Le groupe de travail a commencé ses travaux le 5 novembre 2004. Présidé par un représentant de la DGCCRF, il réunit de nombreux organismes concernés : représentants d'associations de consommateurs, une association de copropriétaires, une représentante des bailleurs sociaux, de multiples représentants d'organismes professionnels, des fonctionnaires des ministères de l'industrie et du logement.

Après avoir dressé l'état des lieux, le groupe s'est attaché à évaluer les dispositifs de prévention des accidents existants et à analyser parallèlement les situations et les dispositifs de prévention à l'étranger, sur lesquelles les missions économiques du ministère français des finances à l'étranger ont pu recueillir de nombreuses informations.

En France, le décret de 1972 imposant un contrôle obligatoire préalablement à la mise sous tension de l'installation d'un logement neuf a été modifié en 2000. Son champ d'application a été étendu aux installations ayant donné lieu à une mise hors tension par le distributeur en vue de la rénovation du logement. CONSUEL est l'organisme chargé de ces contrôles.

Le groupe sera amené à s'interroger sur l'intérêt d'instituer un contrôle systématique des installations anciennes et sur ses conditions de faisabilité, ainsi que sur les suites à réserver à un tel contrôle. (nota décembre 2006 : une première étape est engagée à l’issue de la promulgation de la loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement et du décret 21 décembre 2006 modifiant le code de la construction et de l’habitation en formalisant de nouveaux diagnostics)

Les travaux ont également fait apparaître que les situations des consommateurs ne sont pas homogènes : les réponses devront donc être différenciées et adaptées.

C'est pourquoi les recommandations doivent être réalistes et permettre une mise en sécurité des installations en supprimant des dangers patents tout en tenant compte des contraintes de coût. Il s'agirait de supprimer les causes les plus fréquentes d'accidents et d'avoir un impact maximal en termes de réduction du nombre de décès et de blessures.

En tout état de cause, ce groupe de travail réunit une somme de compétences considérable dont les travaux devraient conduire à des propositions utiles.